Résistance aux antibiotiques

La découverte des antibiotiques en 1928 fut une révolution dans le monde de la médecine. Les antibiotiques sont très efficaces contre les infections bactériennes, mais uniquement contre ces infections. Une consommation excessive et incorrecte peut entraîner une résistance des bactéries, rendant certains antibiotiques moins efficaces voire inefficaces. De ce fait, certaines maladies infectieuses sont à nouveau plus difficiles à traiter, et les interventions et transplantations chirurgicales deviennent plus risquées. Des recherches sur de nouvelles formes d’antibiotiques sont en cours, mais leur développement est très complexe et onéreux et demande donc beaucoup de temps. Il est donc essentiel que l’effet de résistance progressive soit retardé par une consommation correcte.

En outre, certains antibiotiques peuvent avoir des effets secondaires, surtout ceux à large spectre, qui ne font aucune distinction entre les bactéries bénéfiques, essentielles pour notre santé, et les agents pathogènes.

Lire plus

Cela a conduit à la création, en 1999, de la Commission belge de coordination de la politique antibiotique (BAPCOC). La BAPCOC est une instance fédérale qui vise la promotion d’une consommation rationnelle d’antibiotiques en Belgique et qui lutte contre l’augmentation de la résistance aux antibiotiques.

Nous rassemblons ci-dessous plusieurs chiffres clés issus de l’Atlas AIM. Vous y trouverez davantage d’informations détaillées qui peuvent être ventilées selon différentes formes d’antibiotiques, l’âge, le sexe, le statut social et le domicile des consommateurs.

Méthodologie et terminologie

Les données relatives à la consommation d’antibiotiques figurant dans l’Atlas AIM concernent la pratique ambulatoire, à savoir les antibiotiques délivrés en officine publique. Ils représentent le plus gros volume de consommation d’antibiotiques. La consommation à l’hôpital n’est pas prise en compte.

La consommation d’antibiotiques n’est pas considérée par année civile, mais sur la période qui s’étend du 1er juillet au 30 juin de l’année suivante. Elle atteint son plus haut niveau durant l’hiver, en raison du nombre d’infections pulmonaires. Ce pic peut avoir lieu aussi bien avant qu’après la fin d’année, ce qui ferait fortement varier les chiffres si l’on considérait la consommation sur une année civile.

Les chiffres les plus récents repris dans les statistiques ci-dessous concernent la période du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022.

Lire plus

La consommation d’antibiotiques est affichée sur l’Atlas AIM de plusieurs manières. Il convient de les combiner, car outre la consommation totale, il est également essentiel de connaître le nombre de personnes qui sont traitées.

  • Le nombre de doses journalières standard (DDD) par 1 000 personnes par jour : il s’agit de l’unité de mesure international de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui permet d’effectuer des comparaisons avec d’autres pays.
  • Le nombre de traitements antibiotiques entamés par 1 000 personnes par jour.
  • Le nombre de personnes suivant un traitement antibiotique par 1 000 personnes par jour.
  • Le nombre de traitements antibiotiques par 1 000 contacts avec le médecin généraliste par jour.

Consommation d’antibiotiques dans le temps

En dépit des campagnes de sensibilisation, la consommation d’antibiotiques en Belgique est longtemps restée stable. Depuis 2015, une nette diminution s’est toutefois produite, quelle que soit la manière dont la consommation est mesurée. Nous avons pu observer une nette diminution de la consommation au cours de la période de juillet 2020 à juin 2021, mais l’année suivante, les chiffres avaient retrouvé leur niveau de 2019-2020.

Comparée aux pays limitrophes la consommation d’antibiotiques en Belgique reste élevée. Aux Pays-Bas, elle est considérée comme prédominante et atteint environ la moitié de celle de la Belgique. Nous nous situons en 10e place du classement à l’échelle européenne, mais nous dépassons encore la moyenne européenne de 15 DDD par 1 000 personnes par jour.

Vous trouverez davantage d’informations sur la consommation d’antibiotiques dans les différents États-membres de l’Espace économique européen (EEE) (hormis le Liechtenstein) dans les rapports annuels du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC).

Différences selon le sexe

La consommation d’antibiotiques est plus élevée chez les femmes que chez les hommes, et suit pratiquement la même tendance à la baisse. On observe le même écart dans plusieurs études menées à l’étranger.

Il est ressorti d’une étude britannique qu’on prescrivait aussi souvent des antibiotiques aux femmes pour la plupart des affections, excepté pour les infections urinaires. Cette consommation d’antibiotiques plus élevée chez les femmes pourrait s’expliquer par le fait qu’elles se rendent plus souvent chez le médecin. Cette différence apparaît également dans les données AIM.

Différences selon l’âge

Ce sont les populations les plus jeunes (0-4 ans) et les plus âgées (75 ans et plus) qui se voient prescrire le plus d’antibiotiques. Ces deux tranches d’âge sont plus vulnérables aux maladies infectieuses : la plus jeune parce qu’à cet âge, le système immunitaire doit encore se développer, la plus âgée car il commence à montrer des signes de faiblesse. Le taux de consommation d’antibiotiques le plus faible se situe chez les jeunes âgés de 5 à 14 ans et augmente ensuite progressivement avec l’âge.

Quinolones

Les (fluoro)quinolones sont un groupe d’antibiotiques à large spectre. Ce genre d’antibiotique a une forte influence sur l’augmentation de la résistance aux antibiotiques et s’accompagne en outre de nombreux effets secondaires. Le 1er mai 2018, l’INAMI a donc renforcé les conditions de remboursement des quinolones : ils ne sont remboursés que pour des infections spécifiques et bien définies, ou pour des patients souffrant de graves affections sous-jacentes.

Le graphique ci-dessous indique que depuis lors, la consommation remboursée en Belgique a fortement diminué. Selon les chiffres de l’Association pharmaceutique belge, mentionnés dans le Tijdschrift voor Geneeskunde en Gezondheidszorg (Journal de la médecine et des soins de santé), la consommation de quinolones sans remboursement a pris de l’ampleur : seuls 36 % des quinolones délivrés sont remboursés. L’article révèle également que la consommation totale (remboursable et non remboursable) a diminué d’un tiers.

Relecture

Samuel Coenen (Université d’Anvers)