Incapacité de travail | Ne pas être en mesure de travailler en raison d’une maladie ou d’un accident (sauf maladie professionnelle ou accident de travail) |
---|---|
Invalidité | Plus de 1 an d’incapacité de travail |
Entre 2008 et 2022, le nombre de personnes en situation d’invalidité a doublé, dépassant ainsi le cap symbolique des 500 000 en 2022. D’après les statistiques de l’INAMI, 36,9 % de ces personnes en incapacité de travail de plus d’un an sont affectées par des troubles psychosociaux, et les deux-tiers de ce groupe souffrent de dépression ou de burn-out. Entre 2016 et 2022, le nombre personnes en invalidité en raison d’un de ces deux troubles a augmenté de près de 50 %.
Face à ce constat préoccupant, l’AIM et l’INAMI ont conjugué leurs efforts et consolidé leurs données. Cela a donné naissance à une étude sur le profil des individus en incapacité de travail de plus de six mois en raison de troubles psychosociaux, ainsi que sur les facteurs influençant leur transition vers l’invalidité, soit à partir d’un an d’incapacité de travail.
L’étude se concentre sur les trois troubles psychosociaux les plus courants :
- burn-out ;
- trouble de l’humeur (principalement la dépression) ;
- trouble anxieux.
Les chercheurs constatent, dans un 1er temps, que l’incapacité due à un problème de santé mentale au-delà de 6 mois est plus fréquente chez :
- les femmes ;
- les moins de 45 ans ;
- les résidents de Bruxelles et de Wallonie ;
- les personnes ayant un statut socio-économique précaire (bénéficiaires de l’intervention majorée de l’assurance soins de santé – statut BIM).
Cela s’explique notamment par le fait que la prévalence de ce type de maladies soit plus grande dans ces mêmes groupes, comme le démontre l’enquête de Santé 2018 de Sciensano. De plus, selon une étude antérieure de l’AIM, la pauvreté joue un rôle crucial, avec un risque de maladie, d’incapacité et d’invalidité plus élevé dans les quartiers défavorisés.
Dans un second temps, l’étude dévoile qu’un recours plus important aux soins de santé et d’autres facteurs sont associés au risque d’entrée en invalidité.
Recours aux soins
L’étude révèle que les personnes en incapacité de travail en raison d’un trouble psychosocial depuis plus de six mois ont un recours accru aux soins de santé disponibles. En comparaison avec les personnes qui ne sont pas en incapacité de travail, elles consultent davantage un médecin (généraliste et spécialiste) et ont plus fréquemment recours aux médicaments, principalement antidépresseurs et antipsychotiques. Entre un cinquième et un quart d’entre elles sont aussi hospitalisées dans les trois premiers mois de leur incapacité de travail.
Cette tendance au recours accru aux soins est déjà observée avant le début de l’incapacité de travail, atteint un pic au cours des trois premiers mois et se poursuit ensuite. Les troubles psychosociaux semblent donc nécessiter beaucoup de soins médicaux et entraîner des dépenses de santé importantes sur une période prolongée.
Facteurs de risque d’entrée en invalidité
Plus de la moitié (55,1 %) des personnes en incapacité de plus de six mois en raison d’un burn-out sont encore dans l’impossibilité de travailler après un an et entrent alors dans le régime de l’invalidité. Ce pourcentage est encore plus élevé pour les personnes souffrant de troubles anxieux (60,5 %) ou dépression (67,1 %).
Plusieurs facteurs influencent la probabilité d’invalidité. L’âge joue par exemple un rôle crucial : 31 % des 18-54 ans en situation d’incapacité de travail de plus de 6 mois due à un burn-out prolongent leur incapacité au-delà d’1 an, contre 70 % des 55-65 ans.
Le risque de prolonger cette incapacité est également plus important chez :
- les femmes (58 % des femmes en incapacité depuis plus de 6 mois pour burn-out) ;
- les indépendants (67 %) ;
- les bénéficiaires de l’intervention majorée (68 %).
Le recours à des soins spécifiques, comme la consultation d’un psychiatre au cours du sixième mois d’incapacité de travail pour cause de burn-out, peut également être un facteur prédictif pour l’invalidité.
Focus sur les groupes vulnérables
Ces facteurs rappellent que le risque n’est pas le même pour tout le monde et que les politiques doivent se concentrer plus intensément sur les groupes vulnérables identifiés par l’étude, afin de tenter d’obtenir les mêmes résultats les mêmes résultats en matière de santé pour toute la population.
L’identification de ces facteurs peut aussi être utile aux médecins-conseils et aux équipes pluridisciplinaires lors des entretiens avec les personnes au septième mois de leur incapacité, mais aussi lors de l’accompagnement de ces personnes dès le début de leur incapacité dans une perspective d’un retour au travail.
À noter : cette première étude ne couvre pas tous les facteurs potentiels liés à l’incapacité. Des facteurs tels que la situation familiale, les antécédents d’incapacité de travail ou d’invalidité, la nature du travail ou l’évolution professionnelle au sein d’une entreprise n’ont, par exemple, pas été pris en considération.
L’objectif final porté par l’AIM et l’INAMI est de soutenir l’élaboration de politiques d’incapacité de travail basées sur des données scientifiques qui bénéficient tant à la sécurité sociale qu’aux personnes souffrant de troubles psychosociaux.
Il est important de souligner que ces données ne sont pas seulement des chiffres, mais qu’elles peuvent devenir des outils précieux pour les responsables politiques dans l’élaboration de politiques de santé cohérentes avec la réalité du terrain. En comprenant mieux les facteurs qui influencent l’entrée en invalidité, les décideurs peuvent cibler leurs efforts là où ils sont le plus nécessaires et mettre en place des mesures préventives pour réduire le nombre de personnes affectées par les troubles psychosociaux.
L’INAMI et l’AIM invitent aussi les médecins-conseils et leurs équipes à prendre connaissance de ce rapport riche d’informations pour ajuster au mieux l’accompagnement des personnes en incapacité de travail les plus vulnérables.
Vous trouverez davantage d’informations dans le rapport.